Existe-t-il des raisons socio-économiques pour ne pas accorder le droit de vote aux résidents étrangers ?

La participation au référendum du 7 juin est un acte éminemment civique et personnel et chacun s’y exprimera selon ses convictions personnelles et sur base de considérations objectives et subjectives. Ce sera également mon cas et je souhaite partager dans les lignes qui suivent, à titre personnel, quelques réflexions au sujet de la question relative à l’attribution, sous certaines conditions, du droit de vote aux résidents étrangers, puisque c’est cette question qui semble dominer les débats politiques et passionner le grand public et c’est donc la raison pour laquelle, en tant qu’économiste, j’essaierai de faire la lumière sur son aspect socio-économique.

La question de l’élargissement du droit de vote aux étrangers résidents ne peut en effet pas être appréhendée sans tenir compte de la réalité socio-économique de notre pays. A commencer par sa situation démographique atypique, qui a profondément évolué aux cours des 30 dernières années. En effet, le nombre de ressortissants étrangers a plus que doublé en cette période, en passant de 108.900 en 1990 à 258.700 en 2015, avec comme conséquence qu’aujourd’hui 46% des habitants du Grand-Duché n’ont pas la nationalité luxembourgeoise. Par ailleurs, entre 2010 et 2014, plus de 20.000 personnes ont acquis volontairement la nationalité luxembourgeoise, ce qui représente plus de 7% du stock des Luxembourgeois présents sur le territoire.

La forte immigration fait afficher au Luxembourg un rythme de croissance démographique plus de sept fois supérieure à la moyenne européenne, une contribution vitale à notre modèle économique et social.

Quant aux pays d’origine des migrants, le Luxembourg a été, et reste à ce jour, avant tout une terre d’accueil pour des citoyens européens qui représentent, en 2015, presque 9 résidents sur 10 du total des ressortissants étrangers présents sur le territoire. Nous partageons d’ores et déjà avec ces 220.000 citoyens européens un ensemble de valeurs et de droits fondamentaux, ce qui devrait faciliter largement leur intégration politique.

Si l’on tient, par ailleurs, compte du fait que les autochtones sont, en moyenne, plus âgés que les étrangers (47% de la population luxembourgeoise ont plus que 45 ans, par rapport à 33% de la population étrangère) et que les étrangers sont surreprésentés (53%) dans le groupe d’âges de 20-44 ans, c’est-à-dire parmi la population jeune qui est en âge de travailler, l’apport vital des étrangers au financement du modèle socio-économique luxembourgeois devient rapidement apparent. Par ailleurs, plus de un jeune sur deux est étranger.

Les derniers chiffres du marché du travail révèlent qu’au 31 décembre 2014, pour 100 salariés travaillant au Luxembourg, l’on dénombre 28 Luxembourgeois, 28 ressortissants étrangers résidant au Luxembourg et 44 frontaliers. En d’autres termes, l’an dernier l’emploi résident n’a couvert que 56% de l’emploi salarié total. Il est aussi intéressant de constater qu’en moyenne le taux d’emploi auprès des étrangers est plus élevé qu’auprès des autochtones.

La fragmentation du marché du travail est aujourd’hui telle que certaines branches économiques sont quasiment dépourvues de travailleurs de nationalité luxembourgeoise (p.ex. la construction, le secteur HORECA et les activités immobilières), alors que d’autres font apparaître des effectifs dépassant largement la moyenne nationale (p.ex. le secteur public et d’autres secteurs abrités ou non exposés à la concurrence internationale).

Il est par ailleurs intéressant de noter que les 4/5 des électeurs étrangers potentiels sont ressortissants de l’un des  5 pays suivants : Portugal, Italie, France, Belgique ou Allemagne. Par ailleurs, parmi l’électorat étranger potentiel total, 15,2% sont nés au Grand-Duché. Près d’un quart parle régulièrement le luxembourgeois et 9.5% le déclarent même comme la langue qu’ils savent parler le mieux.

Si le Grand-Duché demeure un pays dynamique, c’est aussi parce qu’il bénéficie largement du dynamisme des créateurs d’entreprises étrangers. Parmi les créateurs d’entreprises « luxembourgeois » seuls 26% ont la nationalité luxembourgeoise. A côté des entrepreneurs luxembourgeois, on retrouve surtout des entrepreneurs belges (25%) et français (22%), suivi des Allemands (12%) et des Portugais (7%).

Le Luxembourg ne fera pas marche arrière en matière d’immigration, il ne le pourrait d’ailleurs pas, à supposer qu’il le veuille. Le réservoir de main-d’œuvre autochtone est épuisé depuis belle lurette et la contribution étrangère est devenue indispensable pour financer le modèle socio-économique luxembourgeois, ce modèle qui assure aux résidents et citoyens une qualité de vie remarquable. Pour subsister et maintenir son niveau de vie, le Luxembourg doit aller de l’avant, renforcer ses structures économiques existantes – basées sur les PMEs – , développer des nouveaux modèles de croissance, cultiver et attirer des talents et du savoir-faire, innover, investir et faire preuve d’ingéniosité et d’idées.

Le 7 juin, le Luxembourg sera sous observation internationale. Le 7 juin, le Luxembourg pourra donner aux résidents étrangers la possibilité d’exercer un droit de vote direct aux élections nationales. Ce faisant, le pays ne comblerait pas seulement un déficit démocratique évident, mais gagnerait aussi un atout compétitif que peu de pays seront prêts à lui ravir. Le Luxembourg, sa crédibilité, son image de marque et son capital sympathie en sortiraient grandis.

Au vu de ces considérations, économiques avant tout, je ne vois, à titre personnel, guère de raison d’exclure du droit de vote les résidents non-Luxembourgeois. Leur contribution à l’économie et à la société luxembourgeoise est réelle et bien documentée. Leur refuser un droit citoyen essentiel au seul motif de leur nationalité me semble ne plus être tenable dans une société qui se dit moderne et ouverte. En tant qu’économiste et en tant que citoyen, j’estime que dans un monde globalisé, la nationalité ne devrait plus être un critère d’exclusion pour des résidents étrangers remplissant leurs devoirs citoyens, payant leurs impôts, habitant avec leur famille et scolarisant leurs enfants, participant à la vie sociale et culturelle, bref contribuant au fonctionnement du pays tout entier.

5 thoughts on “Existe-t-il des raisons socio-économiques pour ne pas accorder le droit de vote aux résidents étrangers ?

  1. bonjour
    votre texte manque singulièrement de cohérence et mélange des concepts qui n’ont absolument rien à voir. vous ne faites pas une démonstrattion (ce qui semblait être votre souhait et la promesse de ce blog) mais ne faites qu enumerer des faits pour arriver à une conclusion qui n est en rien une decuction en lien avec les faits avancés. votre texte n a pas plus de pertinence que de dire , la voiture est rouge (un fait) c est donc pour cela qu’il faut mettre la limitation de vitesse à 45 km/heures. votre pseudo-demonstration est du même ordre.
    vous dites : “Au vu de ces considérations, économiques avant tout, je ne vois, à titre personnel, guère de raisons d’exclure du droit de vote les résidents non luxembourgeois” alors peut etre voulez vous qu on reecrive l histoire de la démocratie afin de lier droit de vote a considération économique? car c est votre propos? mais alors au vu des considerations économiques concernant les frontaliers voyez vous des raisons de les exclure du droit de vote? apres tout ils representent 44% des salariés et sans doute pas mal de createurs d’entreprises non?
    “Leur refuser un droit citoyen essentiel au seul motif de leur nationalité me semble ne plus être tenable dans une société qui se dit moderne et ouverte” ah oui rien que cela pas tenable, on aurait bien aimé savoir pourquoi car c est facile de dire ce n est pas tenable (encore faut il dire pourquoi cela n est pas tenable surtout que cela tient plutot pas mal)
    donc pour vous “dans un monde globalisé, la nationalité ne devrait plus être un critère d’exclusion pour des résidents étrangers remplissant leurs devoirs citoyens, payant leurs impôts, habitant avec leur famille et scolarisant leurs enfants, participant à la vie sociale et culturelle, bref contribuant au fonctionnement du pays tout entier” alors comme ca dans le monde globalisé la nationalité n est plus rien, alors pourquoi donc mettre en avant l identité luxembourgeaoie avec du “made in luxembourg” comme distinctig des produits locaux? pourquoi ne pas militer pour un label “made in the world” apres tout vous ne faites qu appeler de vos voeux pour la fin des nations?
    j ai fait l effort d apprendre le luxembourgeois et prendre la nationalité du coup je vote, le schema est simple, classique connu
    je ne vois pas pourquoi d autres seraient exemptés (sachant que la doube nationalité est possible) des efforts que j ai pu consentir. votre tribune est à l image de ce qui c etait passé en france il y a 10 ans sur le traité de l UE, des décideurs tres éloignés de ce que veulent les gens; le non l emportera c est connu c est entendu, et pourtant vous continuez invariablement à marteler votre point de vue sans prendre en compte les aspirations des gens (je connais beaucoups de naturalisés qui comme moi vont voter non) et toujours avec les memes arguments qui ne tiennent pas la route.
    nee nee nee

  2. Les prises de position massives des syndicats, des patrons, de la presse, du monde culturel, évidemment aussi des partis de la majorité, même de l’extrême-gauche, de l’archevêché… ont contribué davantage à ce résultat flagrant, peut-être choquant, que les actions des deux partis opposés et tous les sites “non” ou “trois fois non” dans les médias sociaux confondus. En particulier, la sorte de chantage lancé par certains représentants de l’économie juste avant le référendum a été très certainement contre-productif par rapport à son objet. En effet, la bêtise des gens n’est pas si grande qu’ils ne se rendent pas compte des intentions réelles, tout à fait louables par ailleurs, à savoir la volonté, non, la nécessité, de casser le pouvoir scandaleux et dommageable de la fonction publique et de ses syndicats.

  3. Bonjour,

    Puis-je savoir pourquoi le pourcentage des entrepreneurs Italiens n’est pas mentionné parmi les chiffres des créateurs d’entreprises étrangers?

    Vous écrivez :
    “Il est par ailleurs intéressant de noter que les 4/5 des électeurs étrangers potentiels sont ressortissants de l’un des 5 pays suivants : Portugal, Italie, France, Belgique ou Allemagne. (…)
    Et puis :
    “Si le Grand-Duché demeure un pays dynamique, c’est aussi parce qu’il bénéficie largement du dynamisme des créateurs d’entreprises étrangers. Parmi les créateurs d’entreprises « luxembourgeois » seuls 26% ont la nationalité luxembourgeoise. A côté des entrepreneurs luxembourgeois, on retrouve surtout des entrepreneurs belges (25%) et français (22%), suivi des Allemands (12%) et des Portugais (7%).”
    De combien est le pourcentage des Italiens? Est-il si négligeable qu’il ne mérite pas d’être mentionné? Merci de m’éclairer.
    Corriere EUROPEO.

    • Bonjour. Il n’existe malheureusement que très peu d’études qualitatives et quantitatives sur la typologie des entrepreneurs au Luxembourg. Dans le blog en question, je me suis référé au cahier économique n°103 du STATEC, intitulé « Une typologie des entrepreneurs luxembourgeois ». Les entrepreneurs de nationalité italienne y sont répertoriés en 6e position (après les entrepreneurs de nationalité respectivement luxembourgeoise, française, belge, allemande et portugaise), avec un taux d’environ 5%. Ainsi, environ 1 entrepreneur sur 20 au Luxembourg, à l’aune de cette étude, serait de nationalité italienne. L’on peut toutefois supposer que parmi les entrepreneurs « Luxembourgeois », il y a une quote-part le cas échéant tangible d’Italiens naturalisés ou de Luxembourgeois avec un arrière-fond migratoire italien.

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